La pêche française en sursis : la totalité les aides promises par le Gouvernement il y a 3 semaines se fait encore attendre

Paris, le 12 avril 2022 – L’Association Nationale des Organisations de Producteurs (ANOP) et l’Union des Armateurs à la Pêche de France (UAPF), qui représentent 1200 navires et plus de 300 000 tonnes de poisson débarquées chaque année, tirent la sonnette d’alarme auprès du gouvernement français et de la Commission Européenne alors que la survie de la pêche française est menacée par une envolée des coûts des carburants, exacerbée par la guerre en Ukraine.

Les deux organisations enjoignent le gouvernement français de tenir ses promesses sur le versement des aides et d’agir pour que la Commission Européenne infléchisse sa position, qui à ce jour pose une menace à la survie de la filière française des produits de la mer.

Des mesures d’aide qui se font toujours attendre

Les mesures de réduction du prix des carburants annoncées par le Premier Ministre qui devaient être effective au 1er avril, sont loin d’être une réalité pour tous, laissant les marins- pêcheurs français dans une situation extrêmement tendue.

Cette remise de 35 centimes, courant du 1er avril au 31 juillet 2022 correspond à :

  • Une remise générale à la pompe de 15 centimes par litre de carburant prise en charge par l’État ;
  • Une aide spécifique au secteur de la pêche visant à compenser 20 centimes d’euros par litre de carburant, complémentaire à la remise générale.

Concernant la remise générale de 15 centimes, les entreprises de pêche représentées par l’ANOP et l’UAPF s’étonnent de son caractère discriminatoire. En effet, les navires français qui en raison de leurs zones de pêche s’avitaillent à l’étranger sont purement et simplement exclus du dispositif. C’est donc plus de 30% des achats globaux de carburant qui ne seront pas couverts par ce mécanisme de soutien.

Quant à l’aide spécifique au secteur de la pêche, elle nourrit de plus en plus doutes sur son effectivité. Promise pour le 1er avril dernier, la pêche française ne dispose aujourd’hui d’aucun élément sur les modalités de sa mise en œuvre.

Face à ce risque grandissant, l’ANOP et l’UAPF demandent au Gouvernement français de préciser sans attendre les modalités d’application des aides pour que les professionnels puissent les percevoir au plus vite. En l’absence de visibilité et d’effectivité complètes, c’est une part plus que significative de la production halieutique française qui risque de disparaître, y compris des tonnages importants de poisson vendus dans les ports français – dont près de la moitié de ceux commercialisés dans les ports bretons.

Une incompréhension grandissante face aux décisions de la Commission européenne

L’ANOP et l’UAPF s’étonnent de la faiblesse des mesures de soutien de la Commission européenne annoncées dans le cadre du régime d’aides dérogatoires pour répondre aux effets de la guerre en Ukraine.

Les aides autorisées à titre exceptionnel pour soutenir les secteurs impliqués dans la production alimentaire, dont celui de la pêche, sont plafonnées à un niveau dix fois inférieur à celles autorisées pour les autres secteurs de l’économie communautaire.

Le plafonnement à 35.000€ par entreprise de pêche, et ce, quel que soit le nombre de navires qu’elle opère, est profondément inadapté.

L’iniquité de cette mesure est redoublée par la décision de la Commission d’interdire les aides dérogatoires qui permettraient de dépasser ce plafond, en ne réservant cette possibilité qu’aux seuls achats de gaz et d’électricité, excluant volontairement les produits pétroliers. Cette décision portera un coup fatal à la filière des pêches européennes.

Cette orientation est d’autant plus injuste que le secteur des pêches européen a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 50 % depuis 1990, date de référence du protocole de Kyoto, et augmenté d’autant son efficience énergétique. En outre, les protéines issues des produits de la mer figurent plus que jamais parmi les sources de protéines animales les moins carbonées au monde.

L’ANOP et l’UAPF demandent instamment au gouvernement de tout mettre en œuvre pour que la Commission européenne revoie sa position. Elle doit faire preuve de discernement pour répondre à la situation de crise majeure que vivent les entreprises de pêche européennes et leurs salariés et ne doit pas la confondre avec de légitimes objectifs de décarbonations à moyen terme.

Marc Ghiglia délégué général de l’UAPF : « La pêche française est aujourd’hui gravement menacée par le manque de réactivité du gouvernement dans le versement des aides promises : chaque jour qui passe conduit de plus en plus d’entreprises de pêche dans une impasse. Il devient urgent que les mesures de soutien annoncées deviennent une réalité concrète, et ce, pour tous les navires ».

Julien Lamothe, secrétaire général de l’ ANOP : « Le gouvernement français doit se mobiliser pour que les mesures de soutien annoncées par la Commission européenne viennent réellement soutenir les entreprises de pêche. Il est temps que l’Union Européenne prenne conscience de l’importance de la contribution de l’industrie européenne des produits de la mer à la souveraineté alimentaire du continent et la sécurité alimentaire mondiale. »